Et voila notre troisieme semaine qui commence demain,
avec une tres, mais alors une vraiment tres bonne nouvelle : nous mettons Cedric
a l'ecole. Et hop ! Un de moins. Ca faisait deja plus de trois mois que le
gentil petit cherubin qui n'en rate pas une goutait aux vacances avec cet air
blase qui fait de la moindre petite tete blonde un desoeuvre en puissance :
"amusez-moi" pouvait on lire dans ses yeux. Bref, number one en
classe des lundi. C'est pas l'ecole en uniforme, mais c'est, d'apres les
renseignements toujours tres fouilles de Lidia, la meilleure. Albert lui, c'est
mardi qu'il integre le Learning Center, une sorte de maternelle ou il apprend a
lire, a compter, bref, tout un tas de choses qui lui permettront d'integrer
l'ecole dans de bonnes conditions et surtout, de developper des reflexes
linguistiques en anglais pas evidents pour l'instant. Ca ne peut pas etre pire
que Cedric dont la plupart des phrases sont du genre "Yes, mais...",
"Papa, Albert il a pas flush the toilet...". Et comme il a tendance a
imiter tres serieusement son grand frere; c'est d'ailleurs pour cela que Lidia
les appelle "les Dupont". Il suffit que Cedric veuille quelque chose,
pour qu’Albert emette la meme demande dans la seconde. Et comme Cedric fait
assez souvent la meme chose on les a baptises, Cedric = Me too et Albert =
Dupont.
Des mardi, j'avais envoye plusieurs cv histoire de tater
le terrain cote enseignement du francais ou de l'allemand, ou des deux dans les
ecoles, puisqu'une nouvelle loi oblige les ecoles du primaire et du secondaire
a proposer une seconde langue des 2008. Me voila donc a temoigner de mon
attention pour les ecoliers, mon plus profond desir d'enseigner les langues et
la culture qui va avec, et ma capacite a offrir un type d'enseignement a peu
pres aussi original qu'il sera imagine sur le vif. Deja deux entretiens mardi
et mercredi, a mon avis peu de perspective parce que pas vraiment d'experience
dans le domaine de l'enseignement et pas de diplomes correspondant. Mais
sait-on jamais... Toujours est-il, qu'en retournant d'une de ses ecoles nichees
sur les hauteurs de Dundae avec une vue sur une vallee absolument magnifique
qui m'a fait violemment songe aux splendeurs du Breisgau pres de Schpunzdorff,
j'ai pris un taxi et me suis retrouve a faire la conversation avec un
authentique kiwi de chez kiwi. Arme de ma formidable connaissance de l'anglais,
j'ai immediatement entame la conversation (ne serait-ce que pour me faire
pardonne de n'avoir rien compris du point de rendez-vous qu'on s'etait fixe au
telephone) :
-
le taxi driver : So, U're hear tweO faind a djObb i'NZed ? a'en't U ?
-
moi : (kessidi ?) : Well, I'm here because I want to find a job in New
Zealand
-
taxi driver : Ye, dats Oatta sed. HavUa gottan' interview djuss now ?
-
moi : (meeeerde, j'pige rien a son accent) Yes, the view is really nice
out there and the nature's just so gorgeous
taxi
driver :
Ye A know. Butt' awOs sayin' U djuss had an interview, don't Ua ?
- moi : (ca y est, pige !) Yes. I hope it went
well. Wait and see as the Brits say !
taxi
driver :
U bet I'll cross the fingers 4 U
- moi : (ah bon, ils disent ca aussi ?)
euhh...Yes...sans doute
taxi
driver :
U're obviewsly from abrOd, arnt' U ? WerUfrom ?
- moi : (ca ne s'arrange pas). euuuuh...no ?
taxi
driver :
Oh, U're not ??
- moi : (ca devait pas etre la bonne reponse) Si
si...yes yes I am. But
could you please repeat the question a little bit slower ? I am not so familiar
with english...
taxi
driver :
Oi-Oskd-U-if-U're-frOm-abrOd ?
- moi : (aahh ouais...c'est nettement mieux...) You see, I am french
and I hardly speak a word of english so, I'd appreciate if you keep speaking
slowly
taxi
driver :
Of Cowse ! U knOw t'is so fonny, lOst week A Mate O' mine had a Loady an'
guessed'if she 'os fwom GOmany but she wos from FwAnce..
-
moi : No, no, I'm not from Germany, I'm from France
taxi
driver :
Ye, dats wOtta sed !
- moi : (pffffff..........j'fatigue la)
Bref, vous l'aurez compris, il faut se faire a l'accent
kiwi et encore, avec ce foutu clavier anglais, je ne peux pas vous mettre les
accents et tutti quanti pour vous faire sentir les nuances. Globalement,
on peut dire que l'anglais c'est une langue a base d'accents circonflexes. Bon,
il faut que je me trouve rapidement un friend local avec qui j'irai boire une
Stella Artois (si si je vous jure, ah ils sont forts ces Belges) et qui
m'initiera aux subtilites de l'accent national.
Ou en etais-je ? Les enfants ! Cedric c'est case, Albert
aussi, reste Sosthene...On avait envisage dans un premier temps de recruter une
nounou a mi-temps, c'etait avant de mettre Albert au Learning Center et elle
aurait eu a s'occuper de Albert et Sosthene. Lidia passe une serie de coups de
fils et nous voila avec une nounou "triee sur le volet", chaudement
recommandee par le child care local. Ce qui va suivre, est dans la droite ligne
de ces situations epouvantablement tristes mais qui declenchent le rire, un peu
comme a un enterrement. Au telephone, Lidia la trouve deja hyper sympa. Joanne,
qu'elle s'appelle. Voila donc Joanne qui vient faire une petite visite
de presentation vers 16h30 (je sais l'heure on s'en fout, met c'est pour
l'authenticite de la narration). Lidia et Joanne discutent, et puis
vient le moment ou la conversation devient un peu plus personnelle et ca donne
ca (traduit en francais, NDLR) :
Acte I Scene 1
- Lidia : et alors, vous travailliez ou avant ?
- Joanne: Avant j'etais chez des voisins, une
famille tres gentille chez qui je travaillais deja depuis un an et demi...
- Lidia : et vous n'y travaillez plus ?
- Joanne: Ben non, la dame a perdu son emploi et
du coup elle a du me licencier
- Lidia : Ah zut alors, c'est pas de pot ! Donc la
vous pourriez travailler a plein temps ?
- Joanne : Pas tout a fait, parce que je dois
m'occuper de mes enfants. Voyez-vous, mon mari m'a plaquee il y a un an, comme
ca, un jour il est parti.
- Lidia : Mince alors ! C'est vraiment terrible
ca, et il vous a laissee toute seule avec trois enfants ?! C'est ignoble !
- Joanne : Non, deux enfants, l'aine est mort d'un
cancer tres tot...
- Lidia : Aaa...
- Joanne : ...mais il faut que je m'occupe du
deuxieme qui est mentalement en retard....
- Lidia : ...Ooo...
- Joanne: ....et ca s'arrange pas car on vient de
decouvrir un probleme cardiaque chez la troisieme..
- Lidia :
mais-c'est-terrible-ce-que-vous-me-racontez-la ! Euuuhhh.....puis-je vous
proposer une tasse de the ?
Acte I Scene 2
Lidia me presente Joanne apres avoir longuement
discute avec elle. Je pensais que l'affaire etait conclue et commence a entrer
dans le vif du sujet, le dejeuner.
- moi : Bien ! Vous savez, nous on est plutot vieille
education, donc les enfants dejeunent a la cuisine, il ne faut pas les mettre a
cote parce que sinon Cedric et Albert vont se disputer le contenu de leur
assiette des le debut. Ensuite, veillez a ce qu'ils ne mettent pas les coudes
sur les tables mais bien les deux mains. Ils doivent macher la bouche fermee,
ce ne sont pas des ruminants. Ils vous disent "s'il vous plait" et
"merci" a chaque demande et ils ne parlent pas la bouche pleine. Des
questions ?
- Joanne: ......ah bon ?...ils prennent les repas
assis a une table ??
(non, non, pas du tout, la mangeoire est dans
l'arriere-cour, il faut renouveler le foin deux fois par jours ainsi que l'eau
dans l'auge)
Acte I Scene 3
Lidia et moi au diner.
- Lidia : Que penses-tu de Joanne...?
- moi : Tres sympa...en tous cas...
- Lidia : ...oui. Vraiment tres sympa.
- moi : Pas de pot, tout ce qui lui arrive...
- Lidia : vraiment la poisse...Tiens, elle m'a raconte
qu'il y a trois mois, le village d’a cote etait completement inonde et...
- moi : laisse-moi deviner; c'est la qu'elle habite !
- Lidia : ....vraiment pas de pot, hein ?
- moi : mmmm...je me demande si on a vraiment besoin
d’une nounou...
Pour terminer je reviendrai sur un episode quasi
fantasmagorique tant il est inimaginable en France. J'en suis reste comme deux
ronds de flan. C'etait un jour ou je devais faire des courses...c'est-a-dire
pas un dimanche. Muni d'une liste longue comme une rangee de medailles sur une
poitrine de general sovietique, je suis au supermarche, K-Mart, et m'adresse a
l'accueil ou officie une jeune preposee, du genre
ado-blondinette-queue-de-cheval-en-train-de-compter-les-pieces-de-monnaies a
l'air plutot aimable (air assez rare chez les ados). Je lui demande si par
hasard elle pouvait m'indiquer un cordonnier. Et c'est la que je penetre
emerveille dans une sorte de quatrieme dimension que je n'aurai imaginee dans
mes reves les plus fous : comme elle n'en connait pas, elle va chercher les
pages jaunes de son annuaire, trouve une adresse, charge une autre ado d'aller
reperer les lieux, qui revient quelques minutes plus tard confirmer
l'exactitude des informations. Tout ca avec le sourire et une gentillesse a
faire reprendre confiance dans le genre humain. Alors qu'en France, le nombre
de fois ou j'ai demande un renseignement :
1) chais po...
2) faut demander ailleurs...
3) aaahh si je savais...
4) mais enfin, vous me prenez pour une borne d'infos
(baaah, y a ecrit "accueil" au-dessus de votre tete...?
5) avec un grand sourire malheureusement nous ne
faisons pas ce genre d'articles.
Si c'est pas emouvant, s'pas ?
Promis, la prochaine fois, je ferai moins de dialogues et
puis plus court !!
Tchao,
Achille
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